Soparfi luxembourgeoise : statut, fiscalité, régime mère-fille et enjeux de substance

Statut juridique et objet social

La Société de Participations Financières (Soparfi) est une société commerciale (le plus souvent SA ou S.à r.l.). Elle n’est pas régulée et n’a pas de régime fiscal autonome. Objet principal : détention et gestion de participations, avec possibilité d’activités commerciales si les règles sectorielles sont respectées. Pleine assujettie à l’IRC, à l’ICC et à l’impôt sur la fortune. Les holdings « pures » n’ont pas d’autorisation d’établissement.

La Soparfi est donc un outil flexible, mais soumis aux règles de droit commun applicables aux sociétés commerciales au Luxembourg.

Régime mère-fille

Conditions et application

L’exonération des dividendes et, le cas échéant, des plus-values s’applique lorsque trois conditions cumulatives sont réunies.

  • Premièrement, la participation atteint au 10 % du capital de la filiale ou, à défaut, présente un coût d’acquisition d’au moins 1 200 000 euros pour l’exonération des dividendes et de 6 000 000 d’euros pour l’exonération des plus-values.
  • Deuxièmement, les titres sont détenus ou s’engagent à être détenus de manière ininterrompue pendant une période minimale de douze mois, l’engagement formel de conservation permettant l’application du régime lorsque ce délai n’est pas encore atteint au moment de la distribution ou de la cession.
  • Troisièmement, la filiale est pleinement assujettie, dans son État de résidence, à un impôt sur les bénéfices comparable à l’impôt luxembourgeois, sans bénéficier d’un régime fiscal privilégié. L’exonération demeure en outre subordonnée au respect des dispositifs anti-abus, notamment la clause générale anti-abus, les règles visant les asymétries hybrides et, le cas échéant, les clauses de finalité principale prévues par les conventions fiscales.
ConditionSeuil minimumDétail
Détention minimale10% du capital ou 1,2 million € (dividendes) / 6 millions € (plus-values)Participation directe
Durée de détention12 mois minimumEngagement possible si pas encore atteint
Qualité de la filialeSociété pleinement imposable dans son pays de résidencePas de régime privilégié

Mécanisme de recapture en cas de plus-value

Lorsque la plus-value de cession d’une participation est exonérée, il convient de réintégrer dans le résultat imposable l’ensemble des charges et des dépréciations liées à cette participation qui ont déjà réduit la base imposable, qu’elles l’aient fait au titre de l’exercice de cession ou d’exercices antérieurs.

Cette reprise s’effectue à hauteur du cumul de ces déductions, sans pouvoir dépasser le montant de la plus-value exonérée. La finalité est la neutralité fiscale : une dépense qui a diminué l’impôt par le passé ne peut pas, en plus, se cumuler avec une exonération intégrale du gain.

Par exemple, si des dépréciations et frais antérieurs déduits totalisent 300 000 euros et que la plus-value exonérée atteint 250 000 euros, la reprise sera limitée à 250 000 euros ; si la plus-value s’élève à 400 000 euros, la reprise sera de 300 000 euros.

Opt-out depuis l’exercice 2025

L’exonération peut être écartée lorsque l’éligibilité repose uniquement sur le seuil de coût d’acquisition, et non sur le seuil de détention en pourcentage.

Cela vise les dividendes lorsque le coût d’acquisition atteint au moins 1 200 000 euros, ainsi que les plus-values lorsque le coût d’acquisition atteint au moins 6 000 000 d’euros. L’option d’imposition peut aussi être exercée pour écarter l’exonération de 50 % des dividendes prévue à l’article 115 15.a) de la loi de l’impôt sur le revenu (LIR). Cela peut également aussi être fait dans le but d’utiliser des pertes reportables arrivant à échéance. Le choix s’effectue exercice par exercice et participation par participation.

L’intérêt pratique apparaît lorsque l’imposition au Luxembourg permet d’imputer un crédit d’impôt étranger ou d’améliorer le résultat global après prise en compte des charges, là où l’exonération serait moins favorable.

Retenue à la source et anti-abus

L’exonération accordée au Luxembourg n’efface pas une retenue à la source prélevée à l’étranger lorsque la directive mère-fille ne s’applique pas ou lorsque une règle anti-abus est activée, par exemple le critère de l’objectif principal prévu par une convention fiscale ou la clause générale anti-abus du droit interne.

Dans ces situations, l’issue dépend des stipulations de la convention de non-double imposition pertinente, des conditions qu’elle impose et des règles anti-abus en vigueur dans l’État de la source.

Substance et « Unshell »

La proposition ATAD 3/Unshell a été abandonnée en juin 2025. Les objectifs de lutte contre les entités sans substance sont désormais portés par l’arsenal existant (GAAR, DAC 6 et échanges d’informations, PPT des conventions), sans nouveau texte dédié. Conséquence : exigence de substance démontrable (direction effective au Luxembourg, dépenses locales, moyens, gouvernance).

Prix de transfert : obligations et documentation

Le principe de pleine concurrence est codifié aux articles 56 et 56bis LIR ; l’article 164(3) traite les distributions dissimulées. La Circulaire 56/1–56bis/1 encadre les financements intragroupe (analyse fonctionnelle, profils de risque, marges, documentation). En pratique, la documentation type OCDE (master file/local file) est attendue sur demande, avec attention renforcée sur prêts intragroupe et comptes courants.

Régime IP : article 50ter LIR

Le régime 50ter applique l’approche nexus OCDE : exonération de 80 % sur le revenu net et les plus-values d’actifs éligibles (brevets, certificats équivalents, logiciels protégés par le droit d’auteur). Exclusions : actifs marketing tels que marques, dessins et modèles. Le 50ter est nettement plus strict que l’ancien 50bis (abrogé), tant sur le périmètre que sur la traçabilité des dépenses R&D.

Points opérationnels (banque et gouvernance)

Depuis 2021, l’ouverture d’un compte bancaire pour une société luxembourgeoise nouvellement constituée, en particulier une Soparfi sans activité opérationnelle immédiate, est devenue un processus long et complexe. Les banques appliquent un contrôle KYC renforcé, exigeant un dossier complet sur :

  • Les bénéficiaires effectifs
  • L’origine des fonds
  • Le projet d’investissement
  • Les preuves de substance locale

Cette exigence conduit parfois à des délais de plusieurs semaines voire mois, ou à un refus pur et simple si le profil ne correspond pas à la politique de risque de la banque.

Conclusion

La Soparfi au Luxembourg demeure un cadre robuste de holding internationale, combinant participation exemption (dividendes et plus-values avec recapture), opt-out ciblé depuis 2025, exigences de substance, prix de transfert et régime IP 50ter plus strict que l’ancien 50bis.

Avec ATAD 3 abandonnée et des objectifs désormais portés par DAC 6, la priorité est à une structuration documentée, conforme et efficiente, limitant les risques de retenue à la source, de GAAR/PPT et de requalifications.

Pour un projet de création, de réorganisation ou de financements intragroupe, une revue Soparfi Luxembourg centrée sur l’éligibilité au régime mère-fille, l’usage de l’opt-out, la gestion de la recapture, la documentation TP et l’arbitrage 50ter permet d’optimiser la chaîne de valeur.

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