Leasing d'une œuvre d'art par une société luxembourgeoise : Comptabilité, fiscalité, opérationnel vs financier

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Financer une œuvre d’art au Luxembourg via le leasing séduit de plus en plus d’entreprises. Décoration, image de marque, optimisation fiscale : le leasing permet de louer une œuvre (tableau, photographie, sculpture…) pour embellir ses locaux, tout en bénéficiant d’un cadre comptable et fiscal particulier.

💡 L’essentiel à retenir :

  • Deux régimes de leasing : opérationnel (location simple, souvent préféré pour l’art en raison de sa simplicité) vs financier (crédit-bail avec option d’achat, pouvant être requalifié si critères d’ownership économique remplis).
  • Comptabilité : l’œuvre figure ou non au bilan selon le schéma retenu (attention aux normes IFRS pour les contrats longs).
  • Fiscalité : les loyers peuvent être déductibles, mais attention aux conditions et à la nature du contrat.
  • Sort du contrat : acquisition ou restitution selon la formule.

Note : Depuis 2019 (confirmé en 2025), les normes IFRS 16 imposent une comptabilisation au bilan pour la plupart des leasings, même opérationnels, si la durée dépasse 12 mois – cela peut affecter les contrats d’art longs. Les PME luxembourgeoises, qui représentent une grande part des utilisateurs, bénéficient souvent de cette flexibilité.

Rappels : Leasing d’œuvres d’art, comment ça marche ?

Le mécanisme est simple : une société de leasing ou une galerie achète l’œuvre et la loue à l’entreprise preneuse via un contrat, généralement sur 13 à 60 mois. À l’issue du bail, selon le type de leasing, l’entreprise peut restituer l’œuvre ou l’acquérir à sa valeur résiduelle (souvent entre 5 et 15% du prix initial).

Pendant la durée du contrat, une condition clé pour la déductibilité est que l’œuvre doit être exposée dans les locaux de l’entreprise et accessible à ses salariés ou visiteurs (décoration, halls, salles de réunion, ou même bureaux fermés si justifié professionnellement).

Exemple : Une entreprise tech à Luxembourg-ville loue une sculpture de 10 000 € pour son lobby, avec des loyers mensuels de 200 € déductibles sur 48 mois, et une option d’achat à 10% (1 000 €). Notez que les œuvres doivent être assurées par le preneur pendant la location, impactant les coûts.

Traitement comptable au Luxembourg

Le plan comptable luxembourgeois (PCN) ne prévoit pas de règles spécifiques pour l’art, mais plusieurs principes s’appliquent. Pour les sociétés cotées ou groupes internationaux, les normes IFRS peuvent modifier la comptabilisation.

  • Leasing opérationnel : assimilé à une location classique. L’œuvre n’entre PAS au bilan sous PCN. Les loyers sont enregistrés en compte de charges (généralement dans les frais généraux au compte « décoration et aménagement des bureaux »). Cependant, sous IFRS 16, il peut figurer comme “droit d’utilisation” si durée >12 mois.
  • Leasing financier (crédit-bail) : si le contrat prévoit in fine une option d’achat, le bien peut être à comptabiliser comme immobilisation (classée comme “autres immobilisations” corporelles ou incorporelles) avec amortissement, le preneur devenant alors en substance propriétaire.

🖼 À retenir : En principe, seuls les biens dont l’entreprise est propriétaire figurent à l’actif du bilan. En leasing opérationnel, ce n’est pas le cas sous PCN, mais IFRS 16 peut changer cela.

Distinction entre leasing opérationnel et leasing financier

Type de leasingPropriété en fin de bail ?Œuvre au bilan ?Loyers déductibles ?Option d’achat ?Normes applicables
OpérationnelNonNon (sous PCN ; possible sous IFRS 16)Oui, en chargesNonPCN ou IFRS 16
Financier (crédit-bail)Possible (si levée)Oui, à terme (si levée)Oui pendant la phase locative (non amortissable fiscalement une fois levée)Oui, valeur résiduellePCN ou IFRS 16
  • Leasing opérationnel : location pure, tous risques et bénéfices restent chez le bailleur. L’œuvre retourne au bailleur sauf accord contraire au terme du contrat.
  • Leasing financier (crédit-bail) : à la fin, l’entreprise peut généralement acheter l’œuvre à un prix convenu (valeur résiduelle), devenant alors propriétaire.

Fiscalité luxembourgeoise et leasing d’art

La fiscalité luxembourgeoise se démarque de la fiscalité française notamment sur l’impossibilité d’amortir une œuvre d’art acquise directement (puisqu’elle n’est légalement pas amortissable, à la différence d’un ordinateur ou d’une machine). En comparaison, la Belgique permet l’amortissement direct sous conditions.

En leasing, cependant :

  • Loyers : sont considérés comme charges déductibles du résultat imposable si l’œuvre est exposée dans les locaux professionnels. Cela permet de réduire l’assiette imposable immédiatement, contrairement à un achat direct non amortissable. (Taux d’impôt sur les sociétés : 24,94% en 2025, incluant la contribution au fonds pour l’emploi.)
  • Conditions :
    • L’œuvre doit être effectivement utilisée dans le cadre professionnel.
    • Elle ne doit pas servir à l’enrichissement personnel du dirigeant ou des associés (risque de requalification fiscale).
    • Respecter la proportion entre loyer et chiffre d’affaires (les loyers ne doivent pas être disproportionnés).
  • TVA : Les loyers sont soumis à TVA (17% standard), mais récupérable si l’entreprise est assujettie.

⚠️ Important : Si l’option d’achat est levée à titre personnel (par exemple par le dirigeant), des règles anti-abus peuvent s’appliquer sur la valeur de rachat minorée (référence : art. 6 StAnpG et directives UE ATAD, renforcées en 2025).

Sort des contrats de leasing d’art

À l’issue du bail :

  • Leasing opérationnel : l’œuvre est rendue, ou un nouveau contrat est signé pour une nouvelle pièce.
  • Leasing financier : l’entreprise ou une personne physique liée (dirigeant, associé…) peut acheter l’œuvre à la valeur résiduelle préalablement fixée (généralement 5 à 15% de la valeur initiale). Si rachat par un dirigeant à titre privé, cela peut déclencher une taxation comme avantage en nature si non justifié ; considérez les implications successorales ou de revente.

Cela peut permettre d’enrichir le patrimoine de l’entreprise ou, sous conditions, du dirigeant, qui rachète l’œuvre à titre privé à faible coût après avoir utilisé le levier fiscal pendant la durée du leasing.

Avantages & limites

AvantagesLimites & Risques
Charges loyers déductiblesNon amortissable si achat direct
Pas d’activation au bilan (opérationnel sous PCN)Œuvre doit rester dans l’entreprise
Souplesse de trésorerieContrôle possible de l’administration fiscale (abus), accru depuis 2023 sur les dépenses non essentielles
Possibilité de rotation de collectionDurée et coût total selon contrats
Aspect ESG : contribue à l’image culturelle, aligné avec rapports de durabilité obligatoires depuis 2024Risque de fluctuation de la valeur de l’œuvre (dépréciation artistique)

Tendances 2025

En 2025, on observe une augmentation du leasing d’art numérique (NFT, installations digitales) avec des règles fiscales similaires, mais attention à la volatilité des valeurs. Insistez sur la documentation (photos d’exposition, justificatifs) pour éviter les contrôles fiscaux.

Conclusion

Le leasing d’œuvres d’art est une solution pertinente au Luxembourg pour décorer, communiquer, tout en bénéficiant d’une déductibilité immédiate sur le plan fiscal – à condition de respecter strictement les règles de fond et de forme. Le choix entre leasing opérationnel ou financier dépendra du projet, des objectifs à terme (acquisition ou non) et du profil de risque souhaité.

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